La voiture électrique: quelles perspectives avec quels moteurs?

Image00021.pngL’envolée des prix du carburant depuis un an (l’accalmie actuelle est-elle durable?) et la lutte contre le réchauffement climatique ont remis à l’ordre du jour la voiture électrique. Le Mondial de l’automobile à Paris a permis à certains constructeurs de dévoiler leurs projets dans ce domaine mais d’autres sont, sans doute, encore dans les laboratoires ou les bureaux d’études avec, peut être, quelques innovations?

Le choix de la motorisation et du "carburant" est évidemment un point critique pour les véhicules électriques. Il existe en la matière des options à moyen terme (2015-2020) et à très long terme (au delà de 2030). Commençons d’abord par le long terme. L’option la plus souvent envisagée est celle de la voiture avec un moteur électrique fonctionnant avec une pile à combustible alimentée avec de l’hydrogène. Nous avons évoqué, à plusieurs reprises dans nos brèves, les problèmes que pose cette solution. Le premier est celui de la mise au point de la pile avec un coût de production peu élevé.  Pour les piles envisagées dans une automobile, fonctionnant à température peu élevée, un catalyseur est indispensable sur les deux électrodes (il favorise la recombinaison de l’hydrogène et de l’oxygène de l’air) et, pour l’heure, on n’a pas trouvé d’alternative satisfaisante au platine qui est évidemment coûteux. Le second est celui de la production et du stockage de l’hydrogène: la seule solution réaliste est le stockage du gaz à très haute pression (700 bars) dans des bouteilles lourdes et encombrantes, la production peut être réalisée par électrolyse de l’eau, à partir du gaz naturel ou par gazéification du charbon ou de la biomasse. A moins d’utiliser de l’électricité nucléaire, la production d’hydrogène ne permet pas de s’attaquer au problème du réchauffement climatique puisque tous les procédés vont produire du gaz carbonique. A moins d’une rupture scientifique ou technique (que l’on ne doit pas exclure) cette solution , si l’on peut dire, ne tient pas la route.

Il reste plusieurs solutions qui peuvent être mises en oeuvre à moyen terme. La première est celle du véhicule hybride alliant moteur thermique à essence (ou gazole) et moteur électrique (la Prius de Toyota en est le premier exemple commercial). Cette solution qui est au point économise le carburant, en optimisant le rendement des moteurs; elle pourrait être améliorée si l’on parvenait à alléger les batteries (les batteries lithium-ion, beaucoup plus légères, représentent déjà un progrès notable) qui sont rechargées soit par le moteur thermique, soit avec l’énergie dissipée par le freinage.Ce type de véhicule est avantageux en ville (en fonctionnement en mode électrique); GM projette un véhicule hybride, la Chevy volt, avec des batteries rechargeables la nuit soit à l’aide d’un moteur à essence soit par branchement sur le réseau électrique. Les véhicules hybrides sont plus chers puisqu’ils nécessitent deux moteurs.

D’autres constructeurs font le pari du "tout électrique". Ainsi Renault a annoncé au Mondial de l’automobile à Paris qu’il produirait, à partir de 2011, des véhicules électriques alimentés sur batteries. L’un deux serait une version de son véhicule utilitaire, la Kangoo, qui utilisera une batterie lithium-ion avec une autonomie de 160 à 200 km. Mitsubishi et Daimler ont fait des annonces analogues, Daimler prévoyant l’électrification de sa Smart pour la mettre sur le marché en 2009. Le problème posé par le volume et le poids des batteries est, toutefois, loin d’être réglé; il reste à savoir si le conducteur (et son éventuel passager s’il n’est pas obése!) de la Smart électrique,  une voiture pour la ville, aura encore de la place pour transporter le fruit de ses emplettes (par exemple un paquet beaucoup plus gros que le carton d’une boîte à chaussures achetées au Bon Marché…). L’argument majeur donné par Renault pour vendre ce type de voitures est qu’elles n’émettent peu ou pas de gaz carbonique (si l’électricité est produite par le nucléaire leurs émissions sont nulles) et qu’elles satisferont ipso facto aux normes européennes dans tous les pays européens. L’usage de ces véhicules électriques ne prendra son essor, bien sûr, que si l’on met en place, en ville et sur les axes routiers, des stations pour recharger les batteries ce qui représente un investissement non négligeable. La Ville de Paris a annoncé un plan pour mettre en service une flotte de 4000 véhicules en 2010 pour les louer aux particuliers (une version automobile du Vélib) , cette démarche va dans le bon sens….encore faudrait-il que ces véhicules puissent trouver des places de stationnement dans les rues de la capitale, la municipalité prenant un malin plaîsir à les supprimer peu à peu, ce qui est une politique à courte vue si l’on veut développer l’usage des petits véhicules. …

Il reste, enfin, de la place pour innover plus radicalement. C’est ainsi que l’on envisage d’autres types de motorisation hybride (cf. "High-Efficiency" generators for hybrid vehicles" dans www.technologyreview.com) avec des schémas novateurs. L’un deux correspond à un moteur dit à "piston libre" qui produirait de l’électricité pour alimenter directement un moteur électrique (sans passer par une batterie). Le principe en est le suivant: une barre métallique portant en son milieu des aimants fixes est animée d’un mouvement de va et vient entre deux chambres de combustion (où l’on provoque un cycle compression-explosion-détente comme dans un cylindre classique), en passant périodiquement dans une bobine elle y produit un courant éléctrique par induction. Autrement dit la barre métallique joue le rôle d’un piston mais elle n’est pas reliée à un villebrequin  (d’où le nom de piston libre) pour transmettre la puissance aux roues: elle produit l’électricité alimentant directement un moteur électrique. Ce dispositif a l’avantage de simplifier le moteur, d’éviter d’utiliser du platine comme dans une pile à combustible ou une batterie comme dans les hybrides "classiques",  mais il suppose une bonne électronique pour commander les chambres de combustion ainsi qu’un isolement acoustique, les explosions dans les chambres étant bruyantes. Ce moteur permettrait d’utilser une grande variété de carburants (essence, gazole, éthanol voire hydrogène), il serait donc flexible ….mais il ne résoud pas le problème des émissions de gaz carbonique. Etudié par le Sandia National Laboratory aux USA, ce moteur aurait un rendement global de 50%.

La voiture électrique n’est plus une innovation. Au début du vingtième siécle déjà, Edison, l’inventeur de la lampe à incandescence et qui avait construit les premières centrales électriques notamment à Manhattan, était convaincu que c’était la voiture électrique qui allait permettre à l’automobile de percer (il entra en conflit avec l’un de ses directeurs, Henry Ford à ce sujet…qui le quitta pour fonder sa propre entreprise) et il s’évertua à améliorer les batteries électriques pour concurrencer le moteur à essence, mais en vain. La nécessité de faire des choix énergétiques va-t-elle lui permettre de faire la percée à laquelle elle est promise depuis un siècle et de faire enfin gagner son pari à Edison? Cela n’est pas impossible, même si  la "miniaturisation " des batteries reste toujours un problème à résoudre, des surprises peuvent toujours survenir par exemple du côté de nouveaux hybrides comme le moteur à piston libre…


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