Les nanomatériaux au secours de l’énergie: batteries, éclairage et production d’hydrogène

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  Production, transport et stokage de l’énergie éléctrique (par exemple dans les batteries) requièrent la mise au point de matériaux performants mais  les progrès enregistrés dans le domaine des nouveaux matériaux sont malheureusement souvent lents. C’est pourquoi, depuis une dizaine d’années, les chercheurs ont placé beaucoup d’espoirs, dans l’avénement des "nanomatériaux" dont les dimensions sont de l’ordre du nanomètre (le milliardième de m ou nm) et qui, à ces échelles, sont dotés de propriétés électriques et mécaniques nouvelles. 

La mise au point de nouvelles batteries électriques est certainement un enjeu capitial pour le développement des énergies renouvelables (le solaire et l’éolien) mais aussi pour la propulsion électrique des automobiles( la voiture hybride par exemple). Toutes les batteries sont constituées par deux électrodes (l’anode et la cathode) connectées par un matériau solide ou liquide, l’électrolyte; en connectant ces électrodes par un circuit extérieur on fait circuler les charges électriques négatives, les électrons, et l’on récupère ainsi l’énergie électrique qui a été stockée.Dans les batteries traditionnelles, en usage dans les automobiles par exemple, on utilise du plomb et de l’acide sulfurique comme couple électrolyte. La mise au point de la batterie Lithium-ion par Sony, en 1991, a représenté un progrés très important: l’anode est un composé de graphite et de lithium, la cathode est constituée d’une couche d’oxyde mixte de lithium et d’un métal dit de transition tel que le cobalt, les ions lithium chargé positivement sont extraits réversiblement des électrodes et échangés par celles-ci. Ces batteries peuvent stocker 180 Wh/ kg et leur utilisation est envisagée dans les voitures hybrides (essence et électricité) comme la Prius. Que peut-on espèrer des nanomatériaux? Ceux-ci ont le grand avantage d’offrir un meilleur rapport surface/ volume que les matériaux massiques (ils sont sous la forme de petites particules ou de petits tubes avec une grande surface). En fabriquant des électrodes avec des empilements de nanoparticules (de quelques nm de diamètre)  on améliore ainsi la conductivité électrique de la batterie (les électrons et les ions circulent mieux entre les nanoparticules; on opére par exemple à l’aide de nanoparticules de lithium ou de cobalt enrobées de carbone. Qui plus avec ces dispositions on évite les contraintes mécaniques dans les électrodes qui sont imposées par les cycles de charge et de décharge (ces contraintes relaxent mieux avec les nanograins qui ont une meilleure capacité d’expansion); en revanche la densité des matériaux est abaissée ce qui oblige à accroître le volume de la batterie pour stocker l’électricité mais sa performance globale est augmentée. Les nanomatériaux ouvrent aussi la possibilité d’utiliser de nouvelles réactions électrochimiques pour stocker l’électricité (dans une batterie rechargeable on met en oeuvre une réaction chimique réversible pour stocker/déstoker de l’électricité, par exemple la réaction de l’acide sulfurique avec du plomb). On peut ainsi mettre en oeuvre des réactions dites de "conversion" : un oxyde métallique (de cobalt par exemple) est converti avec l’aide d’ions lithium en nanoparticules de métal qui sont distribuées dans une matrice d’oxyde de lithium. Cette réaction réversible peut être utilisée dans des électrodes de batteries rechargeables. De façon générale les nanomatériaux devraien permettre de réaliser des électrodes et des électrolytes avec une bien meilleure conductivité électrique. Les polymères offriront peut être aussi d’autres perspectives d’utilisation de nanomatériaux (on lira sur toutes ces questions avec intérêt une synthèse complète dans l’article de M.Armand, J-M.Tarascon " Building better batteries", Nature, 451, p. 652-657, 7 February 2008).

Le rendement des moteurs thermiques ne dépasse pas dans le meilleur des cas 55% (pour les turbines à gaz) et la majeure partie de l’énergie est perdue sous forme de chaleur rejetée avec les gaz d’échappement, d’où l’idée d’essayer de récupérer une partie de cette énergie en utilisant l’effet thermoélectrique. Cet effet (appelé encore effet Seebeck) se manifeste par l’apparition d’un courant électrique entre les deux extrémités d’un fil de métal ou d’un semi conducteur qui sont à des températures différentes: on transporte les charges électrique de la source chaude vers la source froide. On peut donc récupérer uen partie de l’énergie thermique des gaz d’échappement inutilisée sous forme d’une énergie électrique pour charger une batterie. Des travaux récents de plusieurs laboratoires de l’université de Berkeley aux USA sur des "nanofils " de silicium de 20 à 300 nm de diamètre montrent qu’il est possible d’obtenir un effet thermoélectrique avec ce type de nanomatériau.Là encore c’est la bonne conductivié électrique d’un nanomatériau qui est un avantage mais aussi et surtout le fait que la conductivité thermique du nanofil est abaissée d’un facteur 100 ce qui est favorable à la thermoélectricité. Ces résultats laissent espérer que l’on pourrait tresser des fils avec des nanofils (en silicium mais aussi avec du bismuth, du tellure, etc. )  pour réaliser des dispositifs thermoélectriques utilisables sur des voitures.

L’éclairage électrique est un autre domaine de l’énergie où les rendements sont mauvais (une lampe à incandescence ne convertit que quelques pour cent de l’énergie électrique en énergie lumineuse). Remplacer les lampes à incandescence par d’autre sources luminueuses (une décision du Grenelle de l’environnement) favorise donc les économies d’énergie. On sait mettre au point des diodes solides qui émettent dans différentes couleurs (les LED ou light emmiting diodes) mais il est plus difficile d’obtenir de la lumière blanche. Plusieurs équipes chinoises de laboratoires de l’Académie des sciences à Pékin (professeur Y.S.Zhao) ont proposé récemment d’utiliser des nanotubes de colorants. Ils ont ainsi fabriqué des nanotubes (de 1 à 100 microns de longueur et 50 à 500 nm de diamètre) en mélangeant deux molécules fluorescentes, le rubrene (qui émet dans l’orange) et le triphenyl- pyrazoline (TPP) qui émet dans le bleu. Si le TPP absorbe de la lumière bleue ou ultraviolette, il transmettra une partie de son énergie pour exciter le rubréne qui émettra dans l’orange, le mélange des deux émissions, si le dosage des deux molécule est adéquat, permet d’obtenir de la lumière blanche dont l’intensité est modulable. On peut donc réaliser des émetteurs de lumière blanche avec ces nanomatériaux… si l’on est capable d’associer les nanotubes pour fabriquer une source macroscopique.

Enfin, une ultime perspective, pour l’heure, est la production d’hydrogène à partir de l’eau en utilisant l’énergie solaire avec un catalyseur constitué par des nanoparticules de titane. Ces nanoparticules ont l’avantage d’absorber beaucoup mieux la lumière solaire que le titane en grand volume (c’est encore un effet de surface sur laquelle on a un meilleur "accés" aux électrons). Ce procédé a été mis au point par une petite société américaine du Maryland, Nanoptek, soutenue par la NASA, qui pense avoir trouvé une solution pour produire avec un bon rendement de l’hydrogène avec de l’énergie solaire. Affaire à suivre…  

Les possibilités offertes par les nanomatériaux sont, on le comprend, importantes. Il faut admettre avec réalisme qu’elles ne vont certes pas révolutionner le secteur de l’énergie (il existe très souvent des prévisions irréalistes sur les perspectives des nanotechnologies!), mais dans des domaines comme les batteries, les conducteurs électriques, les sources  de lumière, on peut s’attendre à ce qu’elles apportent des progrès très substantiels.  


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